Mon blogue

Par Daniel Lapointe

Coups durs dans le secteur de la philanthropie

Les temps sont durs pour le secteur philanthropique au Québec. Tout le progrès accompli en matière de professionnalisation semble aujourd’hui remis en question.

La récente décision de l’Université de Montréal d’abolir son certificat en gestion philanthropique privera les organismes de bienfaisance d’innombrables employés et bénévoles ayant acquis un savoir-faire philanthropique. Le certificat outillait les leaders d’organismes en leur fournissant des compétences et des savoirs variés, notamment en matière de stratégies de développement, d’organisation d’événements-bénéfice, de sollicitation de dons majeurs et de gestion des bénévoles. Ce savoir-faire, il faudra dorénavant l’apprendre ailleurs.

À la suite du retrait de l’Université de Montréal, les associations professionnelles seraient normalement appelées à prendre la relève. Malheureusement, il n’en reste qu’une seule au Québec, à savoir l’AFP-Québec (Association of Fundraising Professionals). L’APGP (Association des professionnels en gestion philanthropique) a cessé ses activités il y a quelques années et Sancio, l’association des fondations du secteur de la santé et des services sociaux auparavant nommée AFESAQ, a récemment suspendu ses activités et pourrait fermer officiellement ses portes sous peu. Notons que l’Association canadienne des professionnels en dons planifiés occupe un créneau très spécialisé et n’offre qu’une partie de la formation dont les leaders d’organismes ont besoin.

Les employés et les bénévoles à la recherche de perfectionnement professionnel ont maintenant moins d’options qu’avant. La performance du secteur philanthropique s’en trouve grandement affectée.

Souhaitons que les fondations philanthropiques privées prennent la relève afin de favoriser l’accroissement d’occasions de développement pratique au service des artisans du secteur philanthropique. Les « think tanks » associés au milieu universitaire mènent une réflexion sociologique bienvenue sur la philanthropie, mais cela n’aide pas les leaders des organismes à la recherche d’outils pratiques pour concevoir et mettre en œuvre les activités philanthropiques.

L’heure est grave, tout le progrès accompli au cours des 10 dernières années est en péril. Il faut trouver les solutions qui permettront de surmonter les nouveaux défis engendrés par la perte de joueurs importants dans l’écosystème philanthropique.

Daniel Lapointe
19 août 2023

Par Daniel Lapointe

Opportunité de relance pour Centraide du Grand-Montréal

Le 14 juin 2021, Centraide du Grand-Montréal annonçait la nomination de monsieur Claude Pinard au poste de président directeur-général.

Je lui souhaite du succès dans ses efforts pour ramener cette institution phare de la philanthropie québécoise au niveau de performance que lui avait permis d’atteindre, en 2012, madame Michelle Thibodeau-DeGuire au terme de son mandat de 21 ans à la tête de l’organisation.

La dernière campagne annuelle de collecte de fonds de madame Thibodeau-DeGuire, celle de 2012, avait récolté 58,2M$. Les années qui ont suivi ont été décevantes, l’organisme ayant échoué à plusieurs reprises à atteindre l’objectif financier de sa campagne annuelle. Il faudra attendre 2019 pour que Centraide du Grand-Montréal, en récoltant 59.7M$, surpasse le résultat de 2012.

Notons toutefois que le résultat de la campagne de 2019 n’est pas vraiment supérieur à celui de 2012 si on les compare en dollars constants. En fait, le résultat atteint en 2012 demeure à ce jour le plus grand succès de Centraide du Grand-Montréal puisque même le résultat de 60M$, atteint en 2020, demeure inférieur, en dollars constants à celui de 2012. Il aurait fallu récolter 64.9M$ en 2020 pour égaler la marque historique atteinte en 2012.

À titre comparatif, Centraide Québec et Chaudière-Appalaches a récolté 15.9M$ en 2020, un montant nettement plus élevé en dollars constants que le montant de 11.3M$ récolté en 2012. Centraide Québec et Chaudière-Appalaches a connu, de 2012 à 2020, une croissance de 26% tandis que Centraide du Grand-Montréal a encaissé un recul de 8% pendant la même période.

En raison de sa feuille de route impressionnante, monsieur Pinard possède les atouts requis pour redresser la situation et redonner à Centraide du Grand-Montréal des résultats de collecte de fonds à la hauteur des attentes de ses parties prenantes. Ce sont les centaines d’organismes communautaires financés par Centraide qui écopent lorsque leur bailleur de fonds s’avère incapable de maintenir des subventions qui suivent le rythme de l’inflation.

Daniel Lapointe
11 juillet 2021

Par Daniel Lapointe

Deuxième édition de l’ouvrage La gestion philanthropique

J’ai le plaisir de vous annoncer la sortie de la deuxième édition de mon livre La gestion philanthropique, guide pratique pour la collecte de fonds, publié aux Presses de l’Université du Québec.   L’ouvrage est disponible depuis le 9 décembre 2020 chez Amazon et chez tous les bons libraires.

La deuxième édition consiste en une mise à jour de l’ouvrage original paru en 2013.  Le lecteur y trouvera une version enrichie, grâce notamment à la collaboration des personnes suivantes :

Ode Belzile, directrice des activités philanthropiques, Fondation J. Armand Bombardier

Louise Bleau, directrice des campagnes annuelles, Réseau des diplômés et des donateurs, Université de Montréal

Alain Demers, directeur général, Association des fondations d’établissements de santé du Québec

Jocelyne Gonthier, consultante en philanthropie

François Lecompte, directeur principal, fiscalité, Raymond Chabot Grant Thornton

Gabrielle Payette-Hébert, coordonnatrice, collecte de fonds, Centre de pédiatrie sociale Laval

Je tiens à remercier mes collaborateurs qui m’ont aidé à produire cette édition revue et augmentée du seul ouvrage québécois de langue française portant sur la gestion philanthropique.

Daniel Lapointe
21 décembre 2020

Par Daniel Lapointe

La deuxième édition du livre Améliorez la gouvernance de votre OSBL connaît un vif succès

La deuxième édition de mon livre Améliorez la gouvernance de votre OSBL, un guide pratique, disponible depuis novembre 2019, jouit d’un accueil enthousiaste. Nous sommes ravis, mon co-auteur Jean-Paul Gagné et moi, de constater que cette nouvelle mouture a suscité un engouement aussi fort que la parution de la première édition au printemps 2016. Un chapitre nouveau portant sur la gouvernance des ordres professionnels, rédigé pour la deuxième édition, a été particulièrement bien reçu par les principaux intéressés. Tous les autres chapitres ont été revus et augmentés. Nous sommes particulièrement honorés que madame Monique F. Leroux, Présidente du Mouvement Desjardins de 2008 à 2016 et Présidente du CA d’Investissement Québec, ait accepté de signer la préface de la deuxième édition.

Je rappelle que le livre est disponible chez tous les bons libraires du Québec, ainsi que sur Amazon et sur le site internet des Éditions Transcontinental.

Daniel Lapointe

8 juillet 2020

Par Daniel Lapointe

Le Refuge aurait pu accepter l’argent

Dans La Presse du 14 mai, le journaliste Jean Siag fait le point sur la décision du Refuge des Jeunes de Montréal de refuser le don d’argent généré par la vidéo mettant en scène le Dr. Horacio Arruda, directeur national de la santé publique, et l’artiste Rod le Stod. La direction du Refuge a justifié son refus en invoquant le fait qu’elle n’avait pas été consultée et que le timing n’était pas bon pour diffuser une vidéo semblable.

Selon moi, le Refuge aurait pu accepter l’argent en tenant le discours suivant :

  1. Nous, membres de la direction du Refuge, aurions préféré être consultés à l’avance par Rod le Stod au sujet de son intention de nous verser les dons générés par sa vidéo tournée avec le Dr. Arruda;
  2. Nous nous questionnons sur l’à-propos de diffuser une vidéo semblable à un moment où la souffrance causée par la COVID-19 est encore très vive. Nous reconnaissons toutefois que la diffusion de cette vidéo a été applaudie autant, sinon plus, qu’elle a été décriée. Il ne revient pas au Refuge de statuer sur cette question très subjective;
  3. Après réflexion, nous nous sommes rappelés que pour accomplir la mission du Refuge, nous avons la responsabilité de recueillir les fonds susceptibles de nous aider dans notre travail au bénéfice des jeunes en difficulté et sans abri;
  4. Nous sommes conscients qu’en prenant cette décision, nous nous exposons à la critique de certaines personnes, mais nous sommes d’avis que la gestion de notre image ne doit pas freiner nos efforts pour accomplir notre mission;
  5. Nous sommes à l’aise avec notre décision car rien ne nous permet de remettre en question les bonnes intentions des artisans de la vidéo;
  6. Notre décision repose sur une réflexion éthique, à savoir qu’un organisme caritatif qui dépend de la générosité de donateurs pour réaliser sa mission ne doit refuser un don que dans des circonstances exceptionnelles, par exemple quand l’argent provient d’une source illégale ou lorsque le donateur cherche par son don à influencer l’organisme en question.

Je tiens à rappeler que les organismes caritatifs comme le Refuge sont d’une grande importance dans notre société car ils répondent à des besoins criants. Leur premier devoir est de réaliser leur mission, avec le soutien financier de donateurs qui partagent leurs objectifs. La direction du Refuge a possiblement des raisons que nous ignorons pour expliquer son refus d’accepter le don rendu possible par la vidéo de Rod le Stod. Je ne veux nullement porter un jugement sur leur décision. J’offre simplement mon point de vue pour alimenter la réflexion de l’ensemble des organismes caritatifs qui se trouvent, à un moment ou un autre, face à des situations semblables.

Daniel Lapointe

18 mai 2020

Par Daniel Lapointe

Leçons de gouvernance

Les médias du Québec ont révélé en mars 2019 qu’une crise avait secoué la Fondation du Dr Julien l’année précédente. De nombreux employés et gestionnaires ont confié à La Presse avoir quitté leur emploi en raison d’un climat de travail rendu toxique par le comportement du Dr Julien et de son épouse, Me Hélène Sioui Trudel, directrice générale de l’organisme à l’époque. La crise a notamment provoqué la démission de la directrice générale et le départ de cinq des 10 administrateurs de la corporation. Le Dr Julien avait remis son chapeau de PDG après le retrait de sa conjointe. Les nombreux témoignages d’anciens employés sont accablants et tracent le portrait d’une organisation qui affiche des pratiques de gouvernance défaillantes. Les directeurs généraux se sont d’ailleurs succédés à un rythme effarant pendant plusieurs années.

Quelles leçons de gouvernance pouvons-nous tirer de la crise qui a ébranlé cette Fondation qui jouissait jusqu’alors d’une belle réputation auprès du grand public?

  1. Une même personne ne doit pas assumer les postes de président du conseil d’administration (CA) et de chef de la direction. Selon un consensus maintenant clairement établi, de saines pratiques de gouvernance dictent que ces deux postes névralgiques soient occupés par deux personnes différentes. Le président du CA et le directeur général assument des rôles à la fois distincts et complémentaires. Rappelons que l’une des responsabilités les plus importantes d’un CA consiste à porter un regard indépendant sur le travail du directeur général et de son équipe de gestion. Un CA sera moins en mesure de s’acquitter convenablement de cette responsabilité si son président occupe aussi le poste de chef de la direction.
  2. C’est dans cet esprit qu’il n’est guère plus sage de confier ces deux postes clés du système de gouvernance à deux personnes qui sont intimement liées dans la vie personnelle. Il s’agit d’un conflit d’intérêts qui risque de porter atteinte aux intérêts supérieurs de l’organisation.
  3. Un CA d’organisme sans but lucratif (OSBL) doit vraiment prendre au sérieux son rôle et assumer avec compétence l’ensemble de ses responsabilités. En vertu de la loi, le CA est l’instance qui rend des comptes à propos des agissements de l’organisation face à ses divers publics. Un CA délègue à un directeur général la gestion des affaires courantes mais il demeure néanmoins imputable de ce qui se passe au quotidien. Par conséquent, les administrateurs doivent prendre les moyens pour être satisfaits que l’organisation est gérée de manière compétente et éthique, dans le respect des lois et de ses parties prenantes internes et externes. Lorsque les directeurs généraux se succèdent à un rythme alarmant, le CA doit chercher la racine du problème.
  4. Dans une situation de crise qui implique le directeur général de l’organisation, un CA a intérêt à piloter directement toute enquête confiée à des experts externes. Il ne doit pas mandater le directeur général, lorsque ce dernier est lui-même visé comme responsable de la crise, pour piloter les enquêtes. De plus, il n’est pas sage, comme ce fut le cas à la Fondation du Dr Julien, de se tourner vers une ressource experte dont la neutralité pourrait être mise en cause, notamment parce qu’elle a par le passé encensé le travail de l’organisation et de son président.

La réputation d’une organisation représente l’un de ses actifs les plus importants. De saines pratiques de gouvernance minimisent ce qui est communément appelé le risque réputationnel. Ceci est également vrai pour les organisations qui sont étroitement identifiées à leur fondateur. Il faut toujours se rappeler qu’un OSBL n’est pas la propriété privée d’une personne. Les OSBL, à fortiori les organismes de bienfaisance qui engagent l’argent public en émettant des reçus en contrepartie d’un don charitable, ont des obligations légales et morales à l’endroit de l’ensemble de la société. Ils doivent par conséquent être gouvernés par des conseils d’administration composés de personnes engagées, indépendantes et compétentes qui seront capables d’exercer un sain contrepoids, face au fondateur et à l’équipe de direction, et favoriser l’atteinte de la plus grande performance organisationnelle.

Daniel Lapointe
23 mars 2019

Par Daniel Lapointe

La nouvelle gouvernance des ordres professionnels

La Loi 98, qui modifie le Code des professions, a enfin été adoptée par l’Assemblée nationale au mois de juin 2017. Les ordres professionnels doivent dorénavant composer avec un nouvel encadrement législatif, notamment en matière de gouvernance.

Le législateur s’est inspiré des meilleures pratiques afin d’introduire un certain nombre de nouveautés dans la gouvernance des ordres professionnels. Voici les 10 principales nouveautés :

  • Le Code des professions fait maintenant référence au directeur général. Ce dernier est chargé de l’administration générale et courante des affaires de l’ordre. Les ordres professionnels, pour la plupart, ont déjà un directeur général mais ils devaient composer depuis toujours avec un Code des professions qui passait sous silence son rôle et ses responsabilités. Cette situation est maintenant régularisée.
  • Le rôle du président d’un ordre professionnel est modifié de sorte que, dorénavant, il exerce un droit de surveillance générale sur les affaires du conseil d’administration, plutôt que sur les affaires de l’ordre. Il est maintenant clair qu’il revient au directeur général, et non au président, de gérer les ressources de l’ordre.
  • Le rôle du conseil d’administration est changé. Il n’est plus chargé de l’administration générale des affaires de l’ordre mais plutôt de la surveillance générale de l’ordre. La nouvelle liste des responsabilités du conseil d’administration reflète d’ailleurs clairement l’esprit du législateur. Le conseil d’administration, notamment : veille à la poursuite de la mission de l’ordre, fournit à l’ordre des orientations stratégiques, statue sur les choix stratégiques de l’ordre, adopte le budget de l’ordre, se dote de politiques et de pratiques de gouvernance efficaces, efficientes et transparentes, voit à l’intégrité des règles de contrôle interne, dont celles de gestion des risques, et assure la viabilité et la pérennité de l’ordre. Le conseil d’administration d’un ordre professionnel se voit enfin confier un rôle et des responsabilités en lien avec les pratiques avant-gardistes de gouvernance.
  • Le comité exécutif ne s’occupera plus de l’administration courante des affaires de l’ordre. Cette responsabilité revient dorénavant clairement au directeur général. Il est à souhaiter que les ordres professionnels, à l’instar d’un nombre toujours grandissant d’organismes sans but lucratif, éliminent leur comité exécutif. Ce comité est peu utile dans les organisations qui disposent d’un directeur général pour gérer les activités courantes.
  • En vertu du nouveau Code des professions, le nombre maximal d’administrateurs est limité à 15. Cette réforme fait écho à un large consensus parmi les experts en matière de gouvernance selon lequel les conseils d’administration de grande taille sont moins à même d’atteindre une performance optimale.
  • Selon le nouveau Code des professions, le conseil d’administration impose à ses membres l’obligation de suivre une formation sur le rôle d’un Conseil d’administration d’un ordre professionnel, notamment en matière de gouvernance et d’éthique… Le législateur a compris qu’il fallait accroître la compétence des administrateurs en matière de gouvernance et d’éthique.
  • Le conseil d’administration devra s’inspirer des lignes directrices en matière de gouvernance que va déterminer l’Office des professions du Québec. Il est à souhaiter que ces lignes directrices permettront d’établir un certain degré de cohérence en matière de pratiques de gouvernance parmi les ordres professionnels.
  • Le nouveau Code des professions accorde beaucoup d’importance à l’éthique et à la déontologie. Les administrateurs d’un ordre professionnel seront d’ailleurs soumis aux normes d’éthique et de déontologie déterminées par l’Office des professions du Québec.
  • Le nouveau Code des professions fait une place aux jeunes en exigeant qu’au moins un poste d’administrateur soit occupé par une personne âgée de 35 ans ou moins. On vise également à ce que le conseil d’administration tende vers la parité entre les hommes et les femmes et reflète les différentes composantes de la société québécoise.
  • Le nouveau Code des professions vise à renforcer le principe selon lequel les administrateurs doivent agir en fonction des intérêts supérieurs de l’ordre et de sa mission. La représentation régionale est établie aux fins d’assurer une diversité régionale au sein du Conseil d’administration et les administrateurs élus n’y représentent pas les professionnels de la région dont ils sont issus.

Les ordres professionnels vont œuvrer dorénavant dans un cadre législatif qui accorde une grande place à l’éthique et à la saine gouvernance. C’est une excellente nouvelle. Ils seront par conséquent davantage outillés pour accomplir leur mission qui consiste à protéger le public.

 

Daniel Lapointe

7 août 2017

Par Daniel Lapointe

Le marché québécois de la philanthropie est-il saturé?

Le marché québécois de la philanthropie est-il saturé? Selon certains, il y aurait trop d’organismes cherchant à recueillir des fonds et les donateurs du Québec seraient sur-sollicités.

Je ne vois pas les choses de cette façon.

Je propose d’emprunter une perspective d’affaires, comme le ferait une entreprise privée voulant accroître ses parts de marché. Les Québécois donnent beaucoup moins que les autres Canadiens aux organismes de bienfaisance. Le don annuel moyen des Québécois se situe en queue de peloton à 208$ alors que celui de l’ensemble des Canadiens s’élève à 446$. Il existe donc au Québec un grand potentiel à exploiter.

La philanthropie ne se limite pas à des dons provenant de grands mécènes et du milieu corporatif. Au Québec, les campagnes de collecte de fonds ont traditionnellement visé le milieu corporatif, plus particulièrement les grandes entreprises. Il est grand temps de se concentrer davantage sur les individus, de bâtir des relations avec eux, d’être à l’écoute de leurs attentes et de leurs priorités, et de leur proposer des engagements sur plusieurs années, qui peuvent notamment prendre la forme de dons intermédiaires, de dons majeurs et de dons planifiés. Il existe au Québec un grand nombre de professionnels et de gens d’affaires qui, sans avoir la capacité des grands mécènes, sont tout de même en mesure d’aller au-delà de l’achat de quelques billets pour un événement-bénéfice. Offrons-nous présentement à ces personnes l’occasion de véritablement investir (et s’investir) dans nos causes?

Il faut de plus changer notre mentalité. Les gestionnaires philanthropiques et les leaders d’organismes de bienfaisance doivent cesser de se percevoir comme des « quêteux ». Lorsqu’ils abordent des donateurs potentiels, ils doivent le faire avec fierté. Ils doivent se définir comme des entrepreneurs sociaux qui s’investissent pour une cause qui leur tient à cœur et qui cherchent à donner aux autres l’occasion d’investir et de s’investir à leur tour. L’émergence d’une véritable culture philanthropique au Québec passe forcément par un changement de mentalité à l’égard de la sollicitation.

À mon avis, le marché philanthropique québécois n’est pas saturé. Il regorge de potentiel pour ceux et celles qui sauront comment l’aborder.

Daniel Lapointe
31 janvier 2017

Par Daniel Lapointe

Plus de 100 participants à une formation en gouvernance

J’ai eu le plaisir d’agir comme paneliste, avec Lili-Anna Peresa, PDG de Centraide du Grand Montréal, et Bruno Déry, président et chef de la direction du Collège des administrateurs de sociétés, lors d’une journée de formation organisée le 6 décembre 2016 par Concertation Montréal. Plus de 100 personnes ont assisté à cette activité portant sur la gouvernance dans les organismes sans but lucratif (OSBL).

J’ai été ravi de constater à nouveau l’intérêt sans cesse croissant des leaders d’OSBL envers les bonnes pratiques de gouvernance. Les administrateurs et les gestionnaires d’OSBL cherchent de plus en plus à améliorer leur gouvernance, pour satisfaire aux exigences de leurs parties prenantes bien entendu, mais aussi parce qu’ils savent qu’un lien existe entre une saine gouvernance et la performance organisationnelle.

Félicitations à Concertation Montréal pour cette heureuse initiative!

Daniel Lapointe
20 décembre 2016

Par Daniel Lapointe

L’obsession des frais d’administration

J’ai donné une conférence portant sur l’obsession des frais d’administration le 3 novembre dernier au Colloque de l’Association des fondations d’établissements de santé du Québec (AFESAQ). Les dirigeants d’organismes de bienfaisance savent à quoi je fais référence lorsque j’utilise le terme « obsession ». Ils sont habitués de répondre aux attentes et aux pressions parfois déraisonnables, exprimées par leurs donateurs et autres parties prenantes, de maintenir à un niveau très bas leurs frais d’administration et de campagne. L’effort pour contenir ces frais se fait malheureusement trop souvent au détriment de la mission des organismes.

Je veux être clair, je ne suis pas contre le contrôle des frais d’administration. J’encourage depuis toujours la gestion efficiente des organismes de bienfaisance. Mais je suis contre la diabolisation des frais d’administration et l’obsession de vouloir les réduire à tout prix.

Les médias d’information nous assomment régulièrement avec des articles qui dénoncent ce qu’ils voient comme un gaspillage de l’argent des donateurs. Les organismes de bienfaisance qui consacrent plus de 15% de leurs dépenses en frais d’administration sont sévèrement critiqués par les chroniqueurs, éditorialistes et autres leaders d’opinion. Le grand public se montre encore plus intransigeant. Selon 40% des répondants québécois, sondés lors d’une récente enquête (Fondation Muttart 2013), les organismes doivent consacrer 100% de leurs revenus à la cause. Par conséquent, 0% en frais d’administration!

Mais quels sont donc ces frais d’administration que nous voulons tant limiter, sinon éliminer?

Prenons une situation type à laquelle pourront s’identifier tous les donateurs. Un mécène appelle au bureau de l’organisme de bienfaisance qu’il soutient afin de demander qu’on lui fasse parvenir par courriel les états financiers les plus récents. Le salaire de l’employé qui répond à son appel est considéré, en tout ou en partie, comme des frais d’administration. Son bureau et son ordinateur, ainsi que le téléphone qu’il utilise pour s’entretenir avec le donateur, représentent des dépenses d’administration. Les états financiers qu’il fera parvenir au mécène ont été préparés par un comptable dont le salaire figure au chapitre des frais d’administration et ont été vérifiés par un auditeur indépendant dont les honoraires constituent des frais d’administration. Afin de produire des états financiers de qualité et de demeurer à la fine pointe des normes de sa profession, le comptable suit de la formation continue payée par son employeur. Ces coûts de formation font partie des frais d’administration. Les coûts du logiciel utilisé par le comptable ainsi que ceux liés au renouvellement de la licence d’utilisation figurent parmi les frais d’administration. L’entretien du site web sur lequel seront affichés incessamment les états financiers représente également des frais d’administration. Les coûts du rapport annuel dans lequel l’organisme inclura ses états financiers, de même que plusieurs autres renseignements d’intérêt pour les donateurs, sont imputés aux frais d’administration.

Comme nous pouvons le constater, les frais d’administration sont à la fois incontournables et légitimes. Ils sont nécessaires pour soutenir la mission de l’organisme de bienfaisance et ne méritent pas d’être assimilés à de l’argent gaspillé. Il faut tâcher de les contrôler, mais il ne faut pas se sentir honteux s’ils s’élèvent à plus de 15%.

Je me méfie davantage des organismes qui affichent un ratio très bas (ex : 10%) que de ceux qui affichent un ratio plus élevé (ex : 25%). Les organismes qui cherchent à tout prix à garder leur frais d’administration à un niveau très bas n’investissent probablement pas où ça compte pour assurer leur efficacité et la pérennité de leur œuvre. Ils payent probablement leurs employés responsables de la collecte de fonds et de l’administration sous la moyenne du marché et doivent composer avec un taux de roulement élevé du personnel. Ils n’acceptent probablement pas de payer pour la formation continue, avec l’impact négatif d’une telle approche sur la performance. Ils ne fournissent pas à leurs employés et bénévoles les meilleurs outils informatiques, ce qui fait que l’organisme ne profite pas au maximum des bienfaits des nouvelles technologies. Ces organismes n’investissent probablement pas dans la gouvernance de leur organisation, n’acceptant pas de dépenser pour faire une planification stratégique selon les règles de l’art ou pour encadrer et soutenir le travail du conseil d’administration et de ses comités. Bref, à vouloir rogner sur les dépenses dites d’administration, les organismes hypothèquent leur capacité de bien accomplir la mission pour lesquels ils ont été créés.

Daniel Lapointe
7 novembre 2016